Le grotesque et son monde baroque et bizarre occupe une place de choix dans le cinéma d'animation polonais.
Le titre de ce programme peut sembler relever de la provocation. Pourtant, on reconnaît facilement le grotesque dans quantité de grandes œuvres du cinéma polonais de prises de vues réelles, de Roman Polanski à Andrzej Zulawski, en passant par Jerzy Skolimowski : une mise en scène réservant une belle place à l’ornementation, aux détails inusités, à la farce caricaturale qui colle bizarrement à la surface du drame, voire de la tragédie. Le cinéma d’animation fait sienne cette caractéristique, en particulier chez les maîtres Walerian Borowczyk, Jan Lenica et Zbigniew Rybczynski, tous promoteurs d’une écriture baroque aux effets mêlant le fantastique, le comique et l’inquiétant. De l’incontournable classique qu’est La Maison de Borowczyk et Lenica au spectaculaire et outrancier Paths of Hate de Damian Nenow, ce programme traverse plus de 50 ans d’histoire de l’animation polonaise en soulignant la permanence de ce trait esthétique.
On y remarquera le travail singulier de Julian Antonisz, qui dessine directement sur pellicule des films au ton grinçant habités par une véritable sensibilité "punk" (What Do We See After Closing Our Eyes date d’ailleurs de 1978).
De tous les films de ce programme, Gentleman’s Romance (Romans dzentelmena), de Tomasz Kozak, est toutefois l’illustration la plus éloquente de l’usage du grotesque, avec son univers aussi extravagant qu’angoissant où la sexualité s’exprime agressivement par l’entremise d’un graphisme exacerbé.
Marcel JEAN
CITIA