Synthèses des conférences 2015

Quelle est la recette du succès d'une série TV visant un public de filles ou de garçons ? | Quelle est la recette du succès d'une série TV visant un public de filles ou de garçons ? / Is There a Recipe for a Successful Girl/Boy TV Series?, Eleanor COLEMAN, Adina PITT, Margie COHN, Julia PISTOR, David MICHEL, Avril BLONDELOT, modératrice Nathalie ALTMANN © G. Piel/CITIA

Quelle est la recette du succès d'une série TV visant un public de filles ou de garçons ?

  1. Intervenants
  2. Modérateur
  3. Avril Blondelot
  4. Adina Pitt
  5. Margie Cohn, Eleanor Coleman, David Michel, Margaret Dean
  6. Question générale

Sommaire

Comment orienter un programme TV animé en fonction du sexe du public ? Comment les stratégies de marque ont-elles influencé le ciblage "genré" ? Ce ciblage est-il toujours pertinent aujourd'hui ? Les stéréotypes sexuels s'exportent-ils bien ? Nos panélistes tentent d'apporter des réponses pour aider les productions à élaborer au mieux leurs programmes en fonction de l'audience ciblée.

Intervenants :

Modérateur :

Avril Blondelot

Eurodata fait partie d'une agence internationale représentée dans différents pays et réalise des prévisions sur le marché international. Beaucoup se demandent si les enfants regardent encore des contenus TV. Avril Blondelot nous montre qu'en 2015, les enfants aux États-Unis regardent en moyenne 3h20 de TV par jour, contre 2h32 en Asie et 2h08 en Europe. Pour l'Europe, cela représente 1h58 en France, 3h55 au Portugal et 2h45 en Italie.

En termes de genre, elle fait remarquer qu'au Canada ce sont les filles qui ont tendance à davantage regarder la télévision, alors qu'en Afrique c'est l'inverse. Mais la tendance générale montre peu de différence de temps de visionnage entre les filles et les garçons. Pour les deuxièmes semestres 2013 et 2014, les chiffres indiquent que l'animation à la télévision se porte bien au niveau international, et qu'elle représentait 50 % des programmes regardés par les enfants en Europe, 90 % en France mais seulement 15 % en Suède.

En France, en Allemagne, en Espagne, au Royaume-Uni et aux États-Unis, l'animation est un marché important. 4/5 des succès télévisuels sont des programmes d'animation. Pour les publics les plus jeunes, les mêmes catégories de programmes fonctionnent bien à la fois pour les garçons et les filles. Pour le reste, les garçons ont en général tendance à préférer les émissions de divertissement et les filles les films réels. Concernant la différence entre les pays, l'animation est de loin plus appréciée aux États-Unis par les garçons alors que nous atteignons la parité en France.

Il est important, pour les producteurs qui veulent créer des émissions visant les garçons et les filles, de penser au diffuseur, et les chaînes locales représentent une grande proportion de la distribution.

Selon ces études, bien qu'il existe des spécificités par pays, les chaînes internationales restent organisées en fonction du genre. La stratégie actuelle a par exemple évolué aux États-Unis, qui cible davantage les garçons. Nickelodeon US est davantage considéré comme orienté vers un public de garçons alors que c'est l'inverse au Royaume-Uni, avec 67 % de filles. Disney Junior semble plus neutre au niveau des genres.

Les programmes basés sur l'humour, l'action et le fantastique marchent en général mieux pour les garçons, alors que pour les filles les thématiques basées sur la famille, les relations humaines et le fantastique seront plus efficaces.

Enfin, les données par pays du rapport juillet-décembre 2014 montrent quels contenus ont été des succès. Tous genres confondus, Scooby-Doo est en tête au Royaume-Uni et en Italie, Pettson och Findus en Finlande et en Suède, et Robin des bois en France, Norvège et Espagne.

Scooby-Doo

Adina Pitt

Adina Pitt représente une des marques mondiales pour enfants et cherche à avoir une audience aussi étendue que possible. Aujourd'hui, beaucoup de choix de programmes et de contenus sont disponibles et pour se différencier certains producteurs et diffuseurs décident de prendre parti. Certaines marques sont ainsi davantage focalisées sur les filles ou les garçons. Il est donc important de connaître les attributs des différentes marques présentes sur le marché.

Elle pense néanmoins que les stéréotypes de genre chez les médias sont moins pertinents aujourd'hui puisqu'il y a beaucoup plus de choix de programmes qu'avant. Un personnage féminin fort peut par exemple bien fonctionner pour les garçons. De plus, la multiplication des écrans et des tablettes à la maison a rendu caduque l'idée que les garçons aux États-Unis ont le contrôle de la télécommande. L'expérience consistant à regarder un programme est devenue davantage individuelle.

Margie Cohn, Eleanor Coleman, David Michel, Margaret Dean

Margie Cohn essaie de briser les idées préconçues pour atteindre un public large, en utilisant par exemple des références de personnages féminins très divers, ce qui n'existait pas autant il y a encore quelques années. L'idée conventionnelle était que les personnages de femmes ne devaient pas être drôles, mais aujourd'hui un garçon peut regarder des programmes destinés davantage aux filles et ne pas se sentir mal à l'aise.

Eleanor Coleman se préoccupe moins du genre que de la force de caractère du personnage. Un de ses programmes met par exemple en scène un personnage masculin qui porte une jupe et qui est apprécié du public.

David Michel a créé des personnages de filles aux caractères très forts, et quand il a commencé à développer ce concept, il était très difficile de le vendre. Les programmes étaient plus souvent destinés aux garçons qu'aux filles. Mais selon lui le succès tient aujourd'hui à l'humour du personnage. Les enfants visionnent aussi davantage sur Netflix ou YouTube, qui n'ont pas de contraintes horaires.

Margaret Dean travaille dans la fabrication de jouets et cible plutôt son public selon l'âge. Mattel voulait briser ces stéréotypes sexuels et en a parlé à d'autres concurrents. Amazon a par exemple réorganisé ses étagères par jouets ou âge plutôt que par sexe. Les adultes ont tendance à féliciter les garçons qui jouent avec les camions et les filles qui jouent avec les poupées, dès l'âge de 18 mois. Il semble aussi que les filles semblent être davantage attirées par les jeux ouverts et créatifs et les garçons davantage par les jeux franchisés. Mais les recherches montrent que les jeux qui stimulent le plus l'imagination rencontrent les meilleurs succès.

Il faut adresser aux parents des messages plus égalitaires en termes de genre et leur montrer que ce sont eux qui ont une influence sur leurs enfants. La clé de la réussite est peut-être d'inventer des modes de jeux plus interactifs.

Question générale

N'avons-nous pas une vision limitée avec ces segmentations ? Par exemple, nous avons eu des personnages de filles assez fortes mais aussi attractives pour un public de garçons comme de filles.
A. P. : Ces protagonistes existent pour répondre à des stéréotypes de genre. Nous devons avoir une compréhension du besoin pour attirer les publics garçons ou filles, mais nous devons aussi rester fidèles à notre marque.
E. C. : Il est aussi important de nous souvenir que nous parlons ici de marques internationales, mais quand nous travaillons avec des studios indépendants européens, les stéréotypes de genre changent. Les enfants évoluent aussi plus vite et plus jeunes qu'avant, et pas tous à la même vitesse. Avec l’évolution et les nouvelles technologies, les enfants peuvent créer et s'exprimer. C'est la raison pour laquelle l'histoire et les personnages comptent. Si un programme est bien fait, il trouvera un public, même dans un autre pays.
M. D. : Le jeu commence à se désintégrer en raison des tablettes et de l'accroissement du nombre d’écrans. Nous avons tendance à interagir plus souvent avec des écrans qu'avec des objets. Nous craignons donc de perdre les nouvelles générations d'enfants et voulons avant tout développer l’intérêt du jeu objet, et moins les différences de genre.
Nous avons fait des recherches pour comprendre ce que voulaient les filles. Elles ont répondu qu'elles voulaient avoir des super héros filles, comme Batgirl ou Superwoman, qui se battent contre les super vilains pour les faire redevenir gentils et devenir leurs amis. Mattel a donc recherché des femmes pour concevoir ces super héros féminins, et leur enlever leurs talons aiguilles peu pratiques pour combattre le crime.
Ruth Handler, la créatrice de Barbie, a créé un avatar culturel qui doit toujours évoluer pour ne pas mourir. Le concept a toujours cherché à incarner l’idéal féminin pour que les petites filles puissent s'identifier. Aujourd'hui Barbie a moins de maquillage, un corps de femme plus jeune, elle porte des talons plats et elle a une famille, des parents et des grands-parents. L'idée est que nous sommes toutes Barbie, et qu'en jouant avec Barbie un enfant peut s'imaginer être qui il veut.

Rédigé par Alain Andrieux, ITZACOM, France

Les synthèses des conférences Annecy 2015 sont réalisées avec le soutien de :

DGE   Région Rhône-Alpes

Conférences organisées par CITIA 

En collaboration avec Natalie Altmann, Media Valley

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